Fin d’un Espoir


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Aria

 

J’avais presque seize ans. Je ne portais pas de fleur, mon père les détestait. Je tenais son grand parapluie ouvert au dessus de ma tête.

Il était à mes pieds, dans cette boite noire et brillante. Elle aussi ruisselait d’eau. Ses amis m’entouraient, mais je ne souhaitais parler à personne.

Vint le moment que je redoutais le plus, quand ils défilèrent un a un devant moi pour me témoigner leur soutient.

Je ne dis rien, me contentant de les regarder l’un après l’autre dans les yeux, sans aucune émotion, sans manifester la triste solitude qui m’emplissait le cœur.

Des poignets de mains, des touches compatissantes sur mes épaules, une étreinte fugace de quelques rares que je ne connaissais pas. Une incessante litanie d’encouragement, des complaintes à n’en plus finir, des marques de reconnaissances pour les qualités tellement innombrables de mon père.

Pourtant, il lui en manquait une qui effaçait toutes les autres. La qualité de sa présence.

Il n’avait pas été le père idéal que j’eus aimé avoir. Je ne l’avais que trop peu souvent entendu dire un mot gentil à mon sujet. Il était comme ça, toujours dans la retenu.

Maintenant, je ne pouvais même plus m’en plaindre.

Arriva le moment, où la dernière personne passa devant moi. Elle me sourit, toucha mon épaule en récitant une dizaine de mots choisis, puis je la regardai s’éloigner.

À quelques mètres, il y avait Vince. Il attendait tête nue sous la pluie. Je le rejoins. En chemin je consultai rapidement mon terminal de poignet. Il affichait ma température. Trente huit degrés et sept dixièmes.

 Il me conduit en voiture, jusqu’à une haute et jolie maison qui se dressait non loin du Boston Common.

Je rentrai seule, quand la porte s’ouvrit sur un grand hall de réception où une secrétaire m’attendait.

  • Bonjour, Mademoiselle Spacel. Le Docteur Mary May va vous recevoir. Si vous voulez bien m’accompagner…

Je la saluai à mon tour.

  • Allons-y, marmonnai-je, le cœur lourd.

Nous prîmes un vieil ascenseur habillé de cuivre et de bois ciré. Il manifesta son âge pendant que nous prenions de la hauteur, produisant des bruits d’un autre temps.

J’entrai dans un cabinet médical au cachet suranné. Une femme à l’allure anglaise m’accueillit.

  • Je suis heureuse de vous revoir, Mademoiselle Spacel. Je vous prie d’accepter toutes mes condoléances, soyez assurée de mon soutient dans l’épreuve que vous traversez… J’ai bien connu vos parents, nous étions proches. J’avais une immense admiration pour votre père, c’était un homme qui a toujours eut à cœur le bien de l’humanité.
  • Bonjour, Docteur May. Merci de m’avoir reçu si vite.

Elle m’accompagna jusqu’à un siège où je pris place.

  • Votre dossier médical est on ne peut plus inhabituel, Aria. Je l’ai soigneusement étudié. Je ne vous cacherai pas que ce qu’il renferme est peu commun.
  • Je ne souhaite pas tergiverser, Docteur May. Comme mon père, j’aimerai aller à l’essentiel. Quelles sont vos conclusions ?

Elle me regarda tristement.

  • Votre génome est en train de muter, Aria, bien au delà de tout ce que nous connaissons actuellement. Votre température s’accroit lentement. Votre production hormonale est très inhabituelle, mais en revanche elle est stable, jusqu’à maintenant.
  • Avez-vous une solution, Docteur May ?
  • J’ai consulté certains de mes confrères les mieux placés dans ce domaine. Aucun d’entre eux ne parvient à comprendre ce qui est en train de se produire dans votre corps.
  • Quelles sont vos conclusions ?

Je la vis baisser les yeux, consulter quelques notes, elle s’éclaircit la voix et me regarda droit dans les yeux.

  • Nous ferons tout ce qui…
  • Je veux la vérité, Docteur.
  • Nous n’avons pas assez de temps, Aria. Par voie de conséquence, il ne vous reste que peu d’options.
  • Combien de temps, Docteur May ?
  • À ce rythme, peut-être moins de deux ans… Je suis désolée, Aria, nous allons tout faire pour essayer de comprendre ce qu’il vous arrive. En attendant, j’ai une proposition à vous soumettre.

Je la regardai, choquée par l’annonce de la date de ma fin.

  • Je vous écoute, parvins-je à dire malgré tout.
  • Nous pouvons vous plonger dans un profond coma, et tenter de contenir mécaniquement la hausse de votre température. Il se peut que nous puissions gagner suffisamment de temps pour vous stabiliser. Qu’en pensez-vous, Aria ?

Je la regardai, très déçue par cette option qui ne me paraissait pas en être une.

  • Je vais réfléchir, Docteur May. Je vous donnerai ma réponse avant la fin de cette semaine.

De nouveau dans la voiture en compagnie de Vince, je tentais de rassembler mes esprits.

Je savais que mon état découlait de l’injection que je m’étais administrée. Ce que je n’arrivais pas à comprendre, c’était comment ce que j’avais mis au point pour soigner mon père, avait pu me mettre dans une telle situation. J’avais méticuleusement pris soins, de ne pas produire de séquence mutagène dans le complexe biologique que j’avais nommé Espoir.

Je me perdais dans la contemplation de la route qui défilait. Quelques minutes plus tard, j’avais pris ma décision.

Plus rien ne me retenais dans ce monde. La dernière personne qui comptait pour moi, je l’avais quitté ce matin. Il n’était pas question de coma et d’attente. Je voulais profiter des derniers moments de ma vie.

Quelques jours plus tard, j’informai le Docteur May de mon choix.

1 comment on “Fin d’un Espoir

    Maylis

    • 11 mars 2020 at 5:19

    Elle est née sous une bonne étoile ? Peut-être qu’à sa naissance le ciel était couvert ! J’espère que tout va bien aller pour elle ? Bien sûr que oui, il y a une suite au premier livre 😉

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